Argousier - Récolte et Transformation des baies

Retour d’expérience de 2025 à Gerpinnes, Belgique

Ce retour d’expérience porte sur un petit ensemble d’argousiers cultivés à Gerpinnes, dans le Hainaut, où cinq plants — un mâle ‘Pollmix’ et quatre femelles, réparties en deux ‘Leikora’ et deux ‘Ergo’ — ont été plantés il y a environ huit ans sur un même talus, avec la même exposition. L’année 2025 a été de loin la meilleure saison depuis la plantation, avec plus de seize kilos d’argouses récoltées, et une quantité encore impressionnante restant sur les arbustes au moment du bilan.


Leikora au soleil couchant (à gauche) et Ergo (à droite) ©Dewolf Laurent

Une récolte en deux temps

La récolte de l’argousier commence d’abord avec un cueille-groseilles Gardena. Cet outil, doté de dents fines pour les petits rameaux et de dents plus larges pour les branches plus épaisses, permet de travailler rapidement. Les baies sont parfois un peu abîmées, mais la transformation suivant immédiatement la récolte, cela reste acceptable. Le rendement est excellent : environ trois kilos d’argouses par heure au début, puis deux kilos en régime stabilisé. En contrepartie, cette méthode génère davantage de débris végétaux (feuilles, petits rameaux), et un certain nombre de baies tombent au sol ou se percent.


Leikora au cueille fruit  (à gauche) haut : Ergo et bas : Leikora (à droite) ©Dewolf Laurent

La suite de la récolte se fait entièrement à la main, avec des différences notables selon les personnes et leur manière de travailler : certains remplissent à peine 500 g dans le même temps où d’autres dépassent 1,5 kg. L’approche la plus efficace consiste à commencer par le centre de l’arbuste et à progresser vers l’extérieur, ce qui permet d’éviter autant que possible les épines. Il est également plus agréable de récolter en après-midi, lorsque les rameaux sont secs et que les baies se détachent plus facilement. Le matin, l’humidité rend la tâche plus lente et la pulpe plus fragile.

La méthode consistant à couper des branches puis à les congeler n’a pas été retenue. Elle aurait nécessité un congélateur beaucoup plus grand, aurait imposé de tailler les arbustes à des endroits non souhaités, et surtout aurait demandé un double passage par le froid — une fois pour détacher les baies, une autre pour conserver le jus ensuite. L’ensemble n’était pas cohérent avec la quantité récoltée ni avec le respect de la physiologie des plants.

Leikora et Ergo : deux comportements complémentaires

Les deux variétés d’argousier, Leikora et Ergo, montrent des différences subtiles mais importantes. Leikora produit des baies légèrement plus grosses et d’un orange plus foncé. Elle mûrit un peu plus vite qu’Ergo, mais termine aussi plus tôt : en fin de saison, ses baies deviennent pales, très mûres, et ont tendance à éclater. Ergo, au contraire, présente des fruits un peu plus petits, d’un orange plus clair, et surtout une meilleure tenue tardive. Il reste possible de récolter longtemps sur cette variété lorsque Leikora commence déjà à décliner. Cette différence d’échelonnement permet une récolte plus souple et plus longue dans la saison.

Transformation : une extraction simple et efficace

La très grande majorité des baies a été transformée au Jazz Max, un extracteur à vis horizontale tournant lentement, qui supporte très bien les fortes charges. Après un tri rapide pour retirer feuilles et petits bois, les baies sont passées entières, queues comprises. L’appareil ne sature jamais ; le facteur limitant devient rapidement le volume de récipients disponibles. Un avantage notable de cette méthode est qu’elle broie également les micro-noyaux, qui contiennent leur part de composés intéressants.

Pour un kilo d’argouses, le rendement est stable : environ 750 ml de jus et une centaine de grammes de matière sèche.


Jazz Max en action (vis horizontale à rotation lente) ©Dewolf Laurent

Conserver le jus d’argousier

Le jus est immédiatement congelé dans des bacs à glaçons afin de préserver au maximum la richesse nutritionnelle du fruit d’argousier (Hippophae rhamnoides). Aucune chauffe n’intervient, ce qui garantit une conservation optimale de la vitamine C et des pigments caroténoïdes. Pendant tout l’automne et l’hiver, ces cubes sont sortis du congélateur la veille pour dégeler lentement au frigo. Ils peuvent être consommés purs, sous forme de petit « shot » matinal, ou mélangés à un jus de pomme.

Le jus frais est naturellement plus homogène. Le jus décongelé se déphase davantage, mais son goût reste identique, avec la même acidité franche et ce parfum rappelant une orange légèrement verte.


Cube de jus frais congelés ©Dewolf Laurent

Une poudre d'argousier nutritive et polyvalente

La pulpe et les noyaux qui sortent de l’extracteur sont étalés pour sécher, soit dans une véranda, soit dans un déshydrateur. Une fois totalement secs, les résidus sont broyés très finement jusqu’à obtenir une poudre d’un orange brun caractéristique, un peu différente d’une variété à l’autre. Cette poudre est utilisée comme une épice : dans un bol de petit-déjeuner, sur du poulet ou des œufs, ou encore dans une salade.

C’est un moyen simple de valoriser toute la matière issue de l’argousier, sans perte et sans cuisson.


Leikora à gauche, ergo à droite (photo de gauche) - Poudre mixée à droite. ©Dewolf Laurent


Une partie de la production sèche. ©Dewolf Laurent

Quelques observations finales

Le goût particulier de l’argouse — acidulé, proche d’une orange pas assez mûre — plaît étonnamment à toute la famille. Les enfants, âgés de douze et quinze ans, réclament même leur petit verre quotidien, ce qui témoigne d’une bonne acceptation malgré le caractère intense du jus.

Les années précédentes, la transformation s’effectuait avec une simple cuisson mix-soupe suivie d’un filtrage, mais le rendement était nettement plus faible et le processus bien plus laborieux. L’extraction mécanique lente et la congélation en petites portions se révèlent aujourd’hui les solutions les plus efficaces.

Un point intéressant : malgré leur abondance et leur visibilité, les baies d’argousier attirent très peu les oiseaux. Elles restent longtemps sur les branches, parfois jusqu’à blanchir et ramollir en fin d’automne, sans être prédatées. Cela facilite énormément la gestion de la récolte.

©Dewolf Laurent 2025 – Jardin-forêt Gerpinnes

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