1. 2 Asiminier : conditions de culture

Culture de l'Asimina triloba en Belgique et ailleurs

Un arôme tropical, une saveur exotique et une texture crémeuse associés à une rusticité de -25°C et à une résistance aux ravageurs : découvrez l'asiminier trilobé, un arbre fruitier hors du commun capable de pousser en Belgique moyennant quelques années de suivi rapproché.

Pour consulter notre article d'introduction sur l'asiminier, cliquez ici.

Dans sa région d’origine, l'asiminier pousse notamment sur les rives de cours d’eau, sous la canopée des forêts de feuillus humides et tempérées de l’est de l’Amérique du Nord. Toutefois, il est important de savoir que ses conditions de culture idéales ne coïncident pas nécessairement avec son habitat naturel, où il se multiplie par drageonnement et pousse en bosquets peu propices à la fructification. En Belgique, il est essentiel d’offrir à l’asiminier des conditions optimales, faute de quoi les chances de succès sont faibles. Découvrons pas à pas comment cultiver ce fruitier hors du commun.


Exposition et protection

L’ensoleillement représente un facteur important de réussite dans la culture du pawpaw. Pour fleurir et fructifier abondamment, mais aussi pour connaître une croissance satisfaisante et développer un port compact et pyramidal, l’asiminier a besoin d’être planté en plein soleil, c’est-à-dire à un emplacement recevant dans l’idéal 12 à 14 heures de soleil direct par jour en été. Dans une optique non commerciale, il est aussi possible d’installer l’asiminier (qui tolère l’ombre) sur un site ombragé, auquel cas la production sera considérablement réduite.

Autre singularité propre à l’asiminier : il est indispensable de protéger les jeunes plants de l’exposition directe aux rayons UV pendant une à deux saisons, sans quoi ceux-ci brûlent puis dépérissent rapidement. Voici le système de protection semblant produire les meilleurs résultats : il s’agit d’installer autour du pawpaw une « cage » confectionnée à partir de grillage à poule de 75 cm de haut, de la fixer solidement au sol à l’aide de piquets d’ancrage ou de poteaux métalliques (en veillant à ne pas abîmer le système racinaire du jeune plant) et de la recouvrir de voile d’ombrage attaché, par exemple, avec des pinces à linge en bois. Une fois que l’arbre mesure plus de 75 cm de haut, on peut retirer le voile d’ombrage.

 Système de protection contre les rayons UV sur notre parcelle test

Sol

L’asiminier s’adapte à une large palette de sols, y compris l’argile lourde, le sable, le limon et les sols rocheux, pourvu qu’ils soient bien drainés et riches en matière organiques. Dans l’idéal, toutefois, on l’installera en sol profond (1 m à 1,8 m de profondeur de terre avant la roche mère, voire plus), limoneux, bien drainé, riche, légèrement acide à neutre (pH de 5 à 7), présentant un taux très élevé de matière organique.

Le pawpaw tolère d’avoir les racines dans l’eau quelques jours ou semaines successives, mais ne pousse pas dans les sols marécageux et les zones humides ni sur les sites où la nappe phréatique est trop proche de la surface. Dans la nature, si l’on rencontre l’asiminier à proximité d’un marécage, ce sera sur une zone un peu surélevée, bénéficiant d’un meilleur drainage.

Asiminiers sur notre parcelle test (Bruxelles, Belgique)., au sol argilo-limoneux

Vent

Les vents forts peuvent endommager et déchirer les feuilles fragiles du pawpaw, faire tomber les fleurs et les fruits et perturber les insectes pollinisateurs. Il est donc recommandé d’installer les asiminiers à l’abri du vent et de planter un brise-vent si nécessaire.

Eau

L’eau joue un rôle important dans la culture du pawpaw, qui ne supporte pas que ses racines sèchent. Le manque d’eau peut ainsi réduire à néant (c’est déjà arrivé) une jeune plantation ou limiter nettement les rendements d’arbres plus âgés. Pour assurer croissance, vigueur et productivité aux asiminiers, il est donc essentiel de prévoir une méthode d’irrigation en cas de sécheresse. À noter que l’excès d’eau est lui aussi néfaste et peut causer une dilution du taux de sucre des fruits, voire endommager les arbres. Dans une région à pluviométrie plutôt élevée comme la Belgique, il est ainsi recommandé d’apporter 7 l par jour par arbre de mai à août (en cas de précipitations insuffisantes). La mise en place d’un paillage épais et la présence d’un taux élevé de matière organique contribuent aussi à une bonne alimentation en eau des arbres. Une fois bien installés, les pawpaws sont capables de supporter une sécheresse estivale modérée.

Espacement

On peut planter les asiminiers en rangées, selon un espacement de 2,5 à 3,5 m sur la ligne et, si l’on souhaite tondre les allées avec un tracteur, de 5 à 6 m entre les lignes. Il est important d’éloigner suffisamment les rangées (au moins 4,5 m) pour éviter tout ombrage. Afin de favoriser la pollinisation, il est recommandé d’installer 3 à 4 plants génétiquement différents à proximité les uns des autres.

Il est aussi possible de planter les asiminiers en bosquets selon un espacement de 3 à 4,5 m entre les différents pieds. Les espacements supérieurs à 6 m sont déconseillés, car ils ne sont pas propices à la pollinisation, et donc à la fructification.

Verger de la Kentucky State University (acteur incontournable de la culture et de la sélection du pawpaw)

Plantation

L’asiminier est doté d’un système racinaire fragile. Dès lors, il est important de leur éviter le choc de transplantation. Voici la méthode de plantation recommandée par Blake Cothron :

  • choisir un jour froid et nuageux de printemps, à la période de gonflement des bourgeons, afin de favoriser la guérison des racines éventuellement abîmées (l’auteur mentionne qu’en période de dormance, elles pourrissent) ;
  • éviter d’exposer les jeunes plants à la lumière et leurs racines à un vent desséchant tout au long du processus ;
  • creuser un trou circulaire d’au moins 45 cm de profondeur et de largeur ;
  • décompacter le fond et les côtés du trou pour faciliter la pénétration des racines ;
  • soigneusement glisser le plan dans le trou, éventuellement en coupant le fond du pot et en incisant un bord ;
  • remplir soigneusement le trou avec de la terre meuble en la tassant légèrement au fur et à mesure pour éviter que les racines ne s’effondrent dans le trou ;
  • veiller à ce que le niveau de la terre coïncide avec celui du terreau du pot (il est déconseillé d’enterrer ou de surélever le plant) ;
  • verser précautionneusement 8 à 15 l par pied en évitant de dénuder les racines ;
  • tasser légèrement du pied ;
  • épandre une généreuse couche de paillage et installer la protection contre les rayons UV.

Fertilisation

Les asiminiers sont très gourmands, particulièrement en azote et en potasse, mais leur proximité avec leurs origines sauvages fait d'eux des plantes adaptables et résilientes. Pour les faire prospérer, il peut ainsi suffire d’épandre une grande quantité de fumier décomposé sous le paillage et de maintenir le tout humide. L’essentiel consiste à surveiller l’état de santé de l’arbre et à agir en conséquence : les feuilles doivent être de grande taille et d’un vert intense, les pousses longues et vigoureuses, la floraison généreuse. Généralement, le pawpaw connaît une faible croissance de sa partie aérienne pendant un ou deux ans, privilégiant l’installation de son système racinaire, ensuite sa croissance s’accélère, puis ralentit une fois l’arbre établi.

Afin de favoriser la santé et la vigueur des arbres, il est possible, tout au long de la saison de croissance, de procéder à des applications foliaires d’émulsion de poisson, d’extrait de kelp ou de thé de compost, lesquels contiennent des oligo-éléments et préviennent les carences.

Une autre solution consiste à appliquer de l’engrais organique (10-2-8, par exemple) sous les arbres avant le débourrement au début du printemps : 30 grammes d’azote par arbre la première année, puis 120 g par arbre (soit 50 kg par ha) de la deuxième à la cinquième année, puis 140 g à 170 g par arbre à partir de la sixième année.

Floraison et fructification

Le pawpaw fleurit sur le bois d’un ou deux ans, pendant trois à quatre semaines. Les fleurs apparaissent tôt dans la saison, avant les feuilles, et ne sont pas pollinisées par les abeilles, mais par des mouches et des coléoptères. Le meilleur moyen de favoriser cette pollinisation atypique consiste à promouvoir et à protéger la diversité sur votre site. Nous vous exposerons cette question plus en détail dans notre article consacré à la pollinisation et aux pollinisateurs du pawpaw.

L’asiminier n’est généralement pas autofertile et nécessite donc une pollinisation croisée avec un autre pied génétiquement différend pour fructifier. En Belgique, il est recommandé d’opter pour des variétés précoces, qui fructifieront à partir du mois d’octobre (un article consacré aux variétés d’asiminier adaptées à la Belgique est également en cours de rédaction).


Taille

Avant toute chose, il faut savoir que l’asiminier peut se passer de taille. Cependant, celle-ci permet de prévenir les dégâts causés par le vent et de faciliter l’entretien et la récolte. À noter que le bois de l’asiminier est fragile et que cet arbre supporte mal les tailles sévères (branches d’un diamètre supérieur à 7 cm), car il cicatrise lentement. Cette observation s’applique également aux pousses situées sous le greffon et aux drageons, qu’il est donc recommandé de supprimer rapidement.

Voici le schéma de taille recommandé par Blake Cothron (voir source) :


Gestion de l’enherbement

La concurrence des graminées peut causer la mort ou, à tout le moins, un retard de croissance chez les jeunes asiminiers et n’est pas bénéfique pour les sujets plus âgés. Aussi, il est recommandé de désherber (avant la plantation) puis de pailler (tout au long de l’année) dans un rayon d’un mètre autour des jeunes pieds, en évitant tout contact du matériau de paillage avec le tronc. Après 5 à 6 ans, il est possible d’installer des plantes de couverture basses et compétitives comme le trèfle et la consoude en lieu et place du paillage.

Maladies et ravageurs

Grâce à certaines substances chimiques qu'il renferme, l'asiminier est très peu vulnérable aux ravageurs, et donc facile à cultiver de manière biologique. En verger, loin de ses plantes compagnes, le pawpaw peut être attaqué, en Amérique du Nord, par des papillons (Omphalocera munr​oei et Talponia plummeriana) ou des champignons (Phyllosticta), par exemple. En Belgique, nous n'avons toutefois encore observé aucune attaque importante, sauf sur les jeunes plants, sensibles aux gastéropodes.

Divers

  • À maturité, vers 8 à 10 ans, un pawpaw doté d’une bonne génétique et cultivé dans des conditions optimales peut produire une dizaine à une vingtaine de kilos de fruits aptes à la commercialisation par an.
  • Comme c’est le cas pour de nombreux autres arbres fruitiers, il est déconseillé d’installer un pawpaw dans une poche de froid, en bas d’une pente. Ce type d’emplacement peut en effet réduire sensiblement les rendements, car les gelées s’y accumulent et causent des dégâts aux fleurs
  • Les pawpaws de grande taille supportent mal la transplantation et ne sont pas un gage de mise à fruits rapide. Il conseillé de privilégier les plants de 60 cm à 90 cm de haut.
  • Les asiminiers greffés commencent généralement à fructifier 3 à 5 ans après leur installation, et continuent à produire pendant 15 à 20 ans environ, tandis que les pawpaws issus de semis comment à produire à l’âge de 5 à 7 ans, et ce pendant au moins 75 à 100 ans (si on les laisse drageonner).

Plant d'asiminier sur notre parcelle test (Bruxelles, Belgique)

Conclusion

Pour mettre toutes les chances de votre côté dans la culture de l’asiminier, privilégiez :

  • un emplacement très ensoleillé (12 à 14 h de soleil par jour en été) et à l’abri du vent ;
  • l’installation de protection contre les rayons UV pendant une à deux saisons ;
  • un sol profond, bien drainé, riche en matière organique, légèrement acide à neutre ;
  • un système d’arrosage permettant d’apporter 7 l par arbre et par jour en cas de sécheresse au printemps ou en été, surtout les premières années ;
  • un espacement de 2,5 à 3,5 m sur la ligne et de 4,5 à 6 m entre les lignes, voire une plantation en bosquet avec des arbres espacés de 3 à 4,5 m ;
  • une plantation dans les règles de l’art afin d’éviter le choc de la transplantation ;
  • une fertilisation adaptée et généreuse, surtout en azote et en potasse ;
  • l’installation d’aux moins deux arbres génétiquement différents en optant, en Belgique, pour des variétés précoces ;
  • la promotion de la biodiversité pour favoriser la pollinisation ; et
  • la mise en place, après désherbage, d’un paillage adéquat dans un diamètre d’un mètre autour de chaque plant (en évitant tout contact avec le collet).

Une fois les années d’installation passées, le pawpaw n’aura plus besoin de suivi rapproché et vous offrira des fruits délicieux qu’on n’aurait jamais cru pouvoir produire en Belgique !

Pour en savoir plus sur l'asiminier, réservez une place pour une de nos visites guidées:
Visites guidées de la pépinière
 

Et pour en acheter, c'est ici:
Vers notre collection d'asiminiers (asimina triloba ou pawpaws)


Source

Cothron, Blake, Pawpaws – The Complete Growing and Marketing Guide, New Society Publishers, 2021.

Crédits photographiques



1.1 Asiminier (pawpaw) : fruit exotique en climat tempéré
Culture de l'asiminier en Belgique et ailleurs